la maison

J'étais dans un abri pour clodos. Il y avait toute ma bande de potes. Même lui, surtout lui. Comme à chaque fois qu'on se regarde, il m'a fait un sourire, je lui ai souri, il s'est approché... mon verre s'est cassé, je me suis coupé la main. Alors j'ai décidé de prendre l'air, j'en avais marre de ce petit jeu.

Je marchais depuis peu quand j'ai remarqué une rue qui montait. Elle était bordée d'une butte verte. J'y ai grimpé et je suis tombée nez à nez avec une maison. Un chateau je devrais dire, mais en pierres de Paris, vous savez ces briques rouges qui datent de la reconstruction. J'y suis entrée, et c'était si facile, il suffisait de pousser une porte. Je suis restée au rez-de-chaussée, dans cette pièce trop encombrée. Il y avait une vieille armoire, je n'ai même pas pensé à l'ouvrir. Je me suis affalée sur le lit.

J'ai été réveillée par une voix d'enfant: une petite fille se tenait là, donnant la main à sa mère. Je savais que c'était sa mère, toute blonde qu'était l'une, châtain qu'était l'autre. On s'est assises sur le canapé, blottties les unes contre les autres, on ne pouvait pas s'enfuir. Le jour tombait, une lampe torche s'est braquée sur nous. Un couple de gardiens, âgés, la femme avait les cheveux blancs qui frisaient. Elle nous a dit de partir.

Le lendemain je me suis retrouvée avec la dame et sa fille sur le canapé défoncé. Je ne sais pas où j'ai passé la nuit, comment j'ai passé la journée qui a suivi. La seule chose qui compte c'est que j'étais là. Le couple de gardiens est arrivé, il nous a regardées et puis la femme, avec difficulté, nous a dit que nous pourrions vivre ici.

C'est alors seulement que nous avons remarqué la bibliothèque dans le couloir. C'était la même que chez mes parents, il y a longtemps: noire, vitrée, des appliques en aluminium, les mêmes objets à l'intérieur, un peu de livres, beaucoup de coquillages et de poupées étrangères. C'était la même que chez la dame aussi, je le savais. Et elle l'a vu quand elle s'est tournée vers moi.

Chaque jour nous découvrions de nouvelles ressemblances avec notre ancienne vie: l'immense table du salon en bois massif, la glace de la salle de bains, ovale...  nous nous avancions vers les étages petit à petit. Finalement nous sommes sorties, par une après-midi ensoleillée. La petite voulait se baigner dans la piscine, cachée par la maison depuis la rue. Elle était couverte de bleus.

Les gardiens ne nous laissaient plus quitter la propriété.